> Quelle a été la plus grande problématique ou frustration durant la grossesse ?

Ma plus grande problématique pendant la grossesse c'était : les autres/l'entourage.

En fait, j'étais déjà pas mal stressée par cette grossesse.

J'étais heureuse mais inquiète de ce qui pouvait arriver au bébé. J'étais responsable d'un petit être.

Et autour de moi, tout le monde y allait de son conseil ou de son expérience sans que je demande quoi que ce soit.

Je me rappelle que ma sage-femme m'avait aidée à mettre les mots sur ce que je ressentais : j'étais enceinte et tout le monde se projetait plus que moi dans ma grossesse, mon accouchement, l'éducation du bébé... "tu vas allaiter ? "

"Tu veux accoucher comment ?" ; "Tu es pour l'épisio (s'ensuit "moi j'étais déchirée...".) ?" ; "Tu manges pas ça (ou la version "tu ne devrais pas manger ça!") ?" ; "Vous allez changer de voiture ?" ; " Vous allez déménager ?" ; " Vous allez faire comment avec le bébé quand tu vas retravailler ? "etc etc...

Et moi je n'étais pas rendue à ces étapes là. Surtout qu'à un moment je trouvais que j'avais vraiment le cerveau embrumé et que je ne pouvais pas traiter autant d'informations à la fois.

C'était frustrant car cela m'empêchait d'être dans l'instant présent (et rien que pour ça je suis contente d'avoir tenu ma grossesse secrète un certain temps, c'était notre secret à nous).

> Aujourd'hui en tant que maman, ton plus gros problème ? Ce qui te manque ?  

Aujourd'hui mon plus gros problème c'est de trouver ma place.

Au tout début (les trois premiers mois), j'étais à fond. J'ai dû craquer une ou deux nuits max.

La petite pleurait et je trouvais normal, j'essayais de ne pas me poser plus de questions. Puis quand on a passé les trois mois, j'ai ressenti comme une pression (que je me suis peut-être mise seule) : elle a trois mois maintenant, elle devrait être réglée pour le repas, le sommeil, dormir dans sa chambre, ne plus faire sa sieste sur moi, se lever à telle heure...

J'avais peur de lui donner de mauvaises habitudes, de mauvaises bases de départ. Et puis bah moi, il était temps que je redevienne moi après trois mois entièrement consacrés à elle. 

Avec le recul, je me demande aussi si je ne commençais pas à stresser quant à la reprise du boulot qui se rapprochait (deux mois avant !). J'avais peur de ne pas être prête et mon entourage me disait que j'en avais besoin pour me "décoller de ma fille".

C'était surtout parce que je l'allaitais et je la calmais. Puis avec la reprise du boulot, la fatigue... Je ne pouvais plus suivre donc mon conjoint s'est plus impliqué et maintenant c'est lui le "parent référent". Maintenant, je tente de revenir mais j'ai l'impression de moins la connaître, de moins savoir quoi faire avec elle...

L'après grossesse c'est vraiment un marathon, on est en hyper vigilance et il faut tenir sur la longueur (et je suis moins bonne là-dedans). J'ai également remarqué que lorsque je suis fatiguée, ses pleurs me font mal physiquement. Je me contracte, je serre les dents... 

 > Y'a-t-il une relation directe avec l'énergie que cela demande ?

La relation est directe selon mon médecin généraliste (et ma sage-femme).

Même quand j'ai l'air au repos, mon esprit est toujours en train de se poser plein de questions ou de réfléchir. Donc ça m'épuise physiquement à un moment.

Au début de l'année, je me rappelle me réveiller car je pensais l'entendre pleurer alors que non.

Puis une fois réveillée, impossible de se rendormir car dans ma tête je planifiais, organisais, revenais sur des choses... Je vois toujours ce que je n'ai pas eu le temps de faire.

Je tente toujours d'optimiser mon temps. Je sais que c'est épuisant et pas toujours utile mais c'est plus fort que moi et cela me rassure. 

> As-tu eu le sentiment de vivre un baby blues ? Est-ce que ce terme est en résonance avec ton vécu ?

Je me rappelle de ma belle-mère qui m'avait posé la question lorsque ma fille avait une semaine.

Sur le coup, je lui en voulais car j'avais eu envie de pleurer quand elle m'avait posé la question. Je me disais que j'avais voulu ce bébé donc je devais assumer et au fond je n'avais aucune raison de ressentir de baby blues. Donc oui j'ai eu ce passage.

Mais ce qui correspond le mieux à mon vécu, c'est plutôt la dépression post partum.

Clairement c'est mon médecin qui a mis les mots en me proposant un traitement médicamenteux (car cela faisait deux mois que je la voyais et l'homéopathie ne fonctionnait pas).

Au début, je le vivais très mal comme un échec, je pleurais en en parlant à ma sage-femme.

J'en ai parlé à PERSONNE.

J'avais honte car je n'avais aucune raison d'aller mal.

J'en ai parlé à mon compagnon, à mon père et deux amies uniquement (et j'ai laissé sous-entendre à ma belle-mère).

J'en ai parlé à ceux qui je pensais ne me jugeraient pas. Seul mon compagnon aurait peut-être dû aussi aller voir ma généraliste pour comprendre (mon médecin lui avait proposé) ce que je traversais (et ce qui m'arrive encore de traverser).

Au début il était soulagé que l'on mette les mots sur ce que j'avais mais parfois je le sens inquiet : sur l'avenir, sur mon état, sur ma capacité à m'occuper de notre fille ou à avoir un autre enfant...

Merci à toi Véronique de m'avoir accompagnée, soutenue et comprise.

Louella